Après avoir été « helper« au sein d’un vignoble dans le New South Wales, employée de ferme parmi les vaches et les moutons, cleaner et assistante en home-stagging dans le Queensland, j’ai testé pour vous : donner des cours de Français à des adolescentes Australiennes !
Actuellement en pleine réflexion linguistique et recherches autour d’un éventuel futur projet FLE (Français Langue Étrangère), je me réjouis de vous donner dans cet article, un aperçu de la scolarité made in Oz ainsi que le récit amusant de mon expérience.
La fille de mes boss de l’époque, Emma, adolescente de 13 ans, planchait un soir sur ses devoirs de Français. L’exercice ? Réaliser un Power-Point pour parler de sa famille. Présenter et décrire les différents membres, évoquer des traits de caractères ainsi que des caratèristiques physiques et partager de brèves tranches de vie. En jetant un oeil sur ses planches lexicales, j’ai confié à Emma qu’elles me seraient bien utiles à moi aussi, pour enrichir mon vocabulaire limité ! Perfectionner la langue de Shakespeare en utilisant celle de Molière ?! Too easy ! J’ai ainsi animé quelques séances d’aide aux devoirs pour Emma et sa voisine Nat.
Il est ô combien fascinant d’appréhender une langue étrangère à travers le prisme de sa langue natale. Celle que l’on utilise sans réfléchir et qui nous permet d’exprimer nos sentiments avec une palette de nuances diverses et variées. Je me suis par exemple rendu compte que s’il est facile de traduire des mots ou d’exprimer des idées, il est un peu plus complexe de transmettre l’essence du Français : avec ses irrègularités, ses sonorités particulières, sa syntaxe.
Nat me disait par exemple qu’elle traduisait « I’m sorry » par « Je suis désolé ». Jusque là tout va bien (je ne suis pas bilingue mais quand même hein !). Puis elle enchaîne en disant :
– Je suis dés’
Ne comprenant absolument pas où elle veut en venir, je lui demande de repèter.
– Here in Australia, we are used to short a lot of words, so I guess you do the same in France. So if I wanna say « Je suis désolé », I can probably say « Je suis dés' » …
Eh ben non ! Pauvres Aussies, à force de transformer barbecue en barbie et afternoon en arvo, voilà le résultat !
L’enseignement du Français commence donc aux alentours de 11 ans, âge à partir duquel les élèves peuvent choisir d’étudier une langue étrangère. Emma avait donc entamé sa 2ème année de Français tandis que Nat était en year 3. L’apprentissage fonctionne principalement par le « mots à mots » ce qui, de mon point de vue, rend compliqué les explications des règles d’orthographe, d’accord et de conjugaison. Emma ou Nat savaient par exemple parfaitement que « le garçon est beaU » mais que « les filles sont « bellES ». Elle savaient l’écrire oui, mais on ne leur a pas appris pourquoi … Eh oui, difficulté supplémentaire que de leur faire comprendre que nous avons des noms masculins ou féminins, tandis qu’ils disent indifféremment « cat » ou « shoes » sans se préoccuper d’un quelconque article ou pronom ! Comme je suis contente d’avoir appris le Français dès ma naissance ! A côté, l’Anglais semble ridiculement facile.
Après ces séances d’aide aux devoirs, Emma a saisi l’opportunité de nous inviter, ma soeur et moi, à assister/donner un cours de Français au sein de son lycée ! Il s’agissait plus exactement de seconder la professeure de Français (venant de Belgique) lors de son cours au sujet de la famille.
Voilà donc comment je me suis retrouvée à Fairholme College, établissement privé non-mixte et catholique à Toowoomba. Ayant fait mes études en banlieue parisienne dans des zones dites « ZEP » (Zone d’Education Prioritaire), découvrir le décor de Fairholme m’a beaucoup surprise ! Ici, l’uniforme est de rigueur et la chapelle au sein de l’école. Des professeurs nous demandant si nous étions perdues ou des étudiantes aux jupes écossaises plissées nous regardant avec des yeux ronds : nous ne sommes pas passées inaperçues !
En entrant dans la classe, je gratifie la prof d’un chaleureux « Bonjour ! », trop heureuse de reparler Français. Qu’elle ne fut pas ma surprise, lorsque cette dernière me rétorqua :
– Hi girls, how’re you ? Oh sorry bonjour (avec un accent Aussie à couper au couteau !!)
En discutant avec cette dernière, j’ai appris qu’elle vivait depuis 17 ans en Australie. D’où la perte totale de son accent belge ! Arrivée en 2000 avec un WHV pour les Jeux Olympiques de Sydney, elle n’était jamais repartie et avait donc entamé ses études ici.
L’effet de curiosité passé, les étudiantes sont tout ouïe en face de nous. La prof nous demande de nous présenter, en adoptant un débit lent et un vocabulaire simplifié. Of course. Prénom, âge, ville de résidence et basta. Je constate que les étudiantes sont écroulées de rire et lancent à tout hasard :
-So you’re 26, right ?
-What did she say ? She lived in Paris I guess but which disctrict ?
-I’m really not sure but they’re sister I think …
-I did not understand a thing !
Stupéfaite, je constate que les étudiantes n’ont (presque) rien compris et font de la déduction !
Le cours commence … Et la prof reste assise derrière son ordinateur. J’observe alors que les cours s’organisent ici de manière autonome, la prof étant plus là pour « surveiller » les étudiantes que proposer un cours magistral au tableau … D’autre part : le cours de Français se déroule … en Anglais ! Et alors là je dis non ! Comment apprendre une langue si ce n’est en totale immersion ?! Je suis bien placée pour le savoir, la richesse et la complexité d’une langue font que chaque détail compte pour en percevoir les moindres subtilités.
Je me souviens que lorsque j’étais en Algérie, adolescente, j’étais partie avec de très légères bases d’arabe et au bout de 15 jours, j’étais capable d’écrire et réciter l’alphabet (bon ok j’ai tout perdu aujourd’hui, such a shame !). Idem ici, 1 mois après mon arrivée en Australie, je comprenais un vocabulaire agricole jusqu’alors inconnu (farm work oblige !).
Ici non : la date, les consignes et autres explications du sujet se font en Anglais uniquement ! Comme je suis déçue … Je me souviens encore de mes cours d’Anglais au lycée lorsque la prof nous répetait sans cesse « In English please ! ». Les rares mots en Français prononcés par la prof sont de plus complètement « déformés » par l’accent Australien … Quel dommage de ne pas apprendre une langue dans les règles de l’art !
La prof reste donc assise à son bureau, en précisant aux étudiantes qu’elles peuvent nous demander de l’aide si besoin. Moi qui me voyait parler de la vie parisienne, improviser des conversations basiques voir même faire des petits jeux de rôles … Il n’en sera rien.
Commence alors l’exercice très complexe de s’adapter au niveau de la classe : je ne sais pas quelle leçon d’orthographe ou de grammaire elles étudient en ce moment, ni l’étendu du vocabulaire à leur disposition. Je me rends alors vite compte que je vais devoir à mon tour expliquer en Anglais des règles de conjugaison et d’accord en Français … How Aussie is that ? En effet, les étudiantes peinent à me comprendre … Alors elles utilisent Google Traduction ! Ici chaque étudiante à son laptop, connecté au Wifi de l’école. Donc « go ask Mr. Google » est bien plus rapide que de me demander d’expliquer …

Plus le cours passe et plus l’atmosphère est détendue. Forcément, les adolescentes me demandent comment traduire « la calvitie » de leur père (baldness CQFD), le mauvais caractère de l’aîné ou encore la description de leur meilleur-e ami-e et leurs jeux préférés. Tandis que leur professeure lance par-dessus son ordinateur :
– Hey girls, did you watch l’Eurovision yesterday ? The singing competition show ? Who did you prefered ?
ou encore :
– Girls stop it now, please be quiet
Car si la pédagogie est différente, l’ambiance aussi ! Les étudiantes sont en effet autorisées à se déplacer dans la salle (plus pour se balader qu’autre chose, soyons honnêtes) ou encore à écouter leur musique, avec leurs écouteurs … C’est donc sur le rythme de Shape of you d’Ed Sheeran que ce cours de Français à Toowoomba s’achève.
Pas mal de fous-rire, un peu d’incompréhension, beaucoup trop de « franglais » mais surtout une belle expérience de French teacher dont je me souviendrais !
Et vous ? Avez-vous eu une expérience insolite en Australie ? Quel job avez-vous exercé durant votre WHV ? Etes-vous tenté par le soutien scolaire ?
J’ai un vague souvenir en Irlande d’avoir assisté à un cours de Français avec des filles en uniforme également. J’y étais pour immersion dans une famille pendant trois ou quatre semaines. Que de bons souvenirs avec cette famille ! Pendant mon Erasmus a Madrid j’ai donné des cours de Français je trouvais ça plutôt fun et surtout pas vraiment compliqué quand on connaît si bien sa propre langue, ça permettait de boucler des fins de mois et d’aller manger quelques tapas 🙂
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Complètement ! Cette piste professionnelle m’intéresse de plus en plus … Parler Français tout en vivant la vie d’expat’ : what else ?
Je ne savais pas pour l’Irlande, ça a du être top comme expérience en effet ☺
PS : parler de tapas est un acte déloyal au vue de l’état de la « gastronomie » ici … ^^
Merci pour ton commentaire 😙
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un petit bonjour de la banlieue(93)d ‘ille de france.C ‘est toujours avec plaisir que nous lisons tes belles pages d’aventures et de decouvertes.ta détermination nous épate,nous te souhaitons toute la reussite possible pour tes projets à venir.Gros bizous de France.Bruno/Catherine.
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Oh merci, c’est adorable !! Ravie de voir que vous suivez les aventures, c’est très gentil 😉 Beaucoup (trop ?) de projets en tête donc je prends vos encouragements avec plaisir ! A très bientôt, bisous
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